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Abus sexuels dans l’Église : 6 500 appels reçus par la commission Sauvé, Christophe Henning, La Croix le 12.11.2020

Les faits À l’occasion de l’assemblée de la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref) qui se tient en visioconférence jusqu’au 13 novembre, Jean-Marc Sauvé a présenté un premier bilan de la cellule d’écoute de la Ciase. Les religieux travaillent à une reconnaissance individualisée des victimes.
Christophe Henning, le 12/11/2020 à 15:55 Modifié le 12/11/2020 à 15:56
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Abus sexuels dans l’Église : 6 500 appels reçus par la commission Sauvé
Les victimes sont majoritairement des hommes de plus de 50 ans, et 50% des faits remontent aux années 1950 et 1960.

Lors de l’assemblée de la conférence des religieux et religieuses de France (Corref) tenue du 10 au 13 novembre en visioconférence, il a été de nouveau question des abus sexuels vécus dans l’Église. Après un état des lieux encore provisoire mais très avancé dressé par la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase), les religieux ont fait le point d’un important travail déjà engagé à propos de la réparation vis-à-vis des victimes.

État des lieux
Mercredi 11 novembre, le président de la commission, Jean-Marc Sauvé, a pu dresser un premier bilan des dix-sept mois d’écoute qui s’achevaient au 31 octobre : plus de 6 500 appels de victimes ou de témoins ont été reçus par la Ciase. 42 % des personnes ont pu être ensuite dirigées vers des associations de victimes. 120 auditions de deux heures ont été réalisées avec des victimes et 45 sont encore programmées, simplement retardées en raison de la crise sanitaire. 70 entretiens de recherche ont été tenus et, sous la direction de l’INSERM, une large enquête porte sur 30 000 personnes pour évaluer l’importance des abus commis aussi bien dans l’Église que dans les familles, l’école, le sport…

→ À LIRE. Abus sexuels : la commission Sauvé élargit son enquête hors de l’Église

En ce qui concerne les témoignages reçus par la commission, ils permettent aussi de mieux cerner les diverses situations d’abus. Majoritairement des hommes (62 %), les victimes sont âgées (50 % ont entre 50 et 69 ans, et 30 % ont plus de 70 ans), et les faits anciens : 50 % des affaires se sont déroulées dans les années 1950 et 1960, 18 % dans les années 1970. Des appels portaient sur des faits plus récents : 7 % des cas dénonçaient des faits des années 1990, 3 % dans les années 2000, avec une recrudescence dans les années 2010 avec 5,7 % des cas signalés.

Un profond besoin de reconnaissance
Les prédateurs s’en sont pris à des mineurs (87 %), principalement âgés de 6-10 ans pour 30 % des cas, de 11-15 pour 35 % des dossiers. À noter encore que 13 % des victimes étaient de jeunes majeurs, dont un tiers était engagé au séminaire ou dans une formation de religieux ou religieuse.

Seuls 14 % des cas signalés ont donné lieu à une plainte en justice, sans pouvoir préciser si celles-ci avaient eu une suite, « alors qu’il y a nécessité de rendre justice aux victimes d’une manière ou d’une autre », a insisté Jean-Marc Sauvé.

→ ENTRETIEN. Jean-Marc Sauvé : « L’abus sexuel sur des personnes majeures a sa perversité propre »

Après avoir communiqué ces données, le président de la Ciase a souligné les conséquences pour les victimes qui peuvent aller jusqu’à « un empêchement d’être ». Sans préjuger du rapport final que la Ciase remettra à l’automne 2021, il insistait sur « la blessure profonde et invisible » provoquée par les abus et « un profond besoin de reconnaissance individuelle et collective des victimes ». Il pointait l’indispensable réflexion sur l’aspect systémique qu’il faudra examiner, ainsi que « les fautes et manquements personnels, collectifs et institutionnels ». Il poursuivait en pointant « la faillite de l’autorité qui devait protéger et a trop souvent trahi sa mission. »

Une justice réparatrice
Livrant quelques réflexions personnelles aux supérieurs des instituts, Jean-Marc Sauvé insistait : « l’abus est porteur de mort, il peut faire mourir physiquement, ravager une vie et peut-être même plusieurs générations. C’est une dévastation infinie de l’être ».

→ ANALYSE. Abus sexuels, comment l’Église peut reconnaître la souffrance des victimes

Enfin, l’ancien patron du Conseil d’État confiait une dernière réflexion personnelle : « Je ne peux pas oublier le garçon de 12 ans que j’étais et qui avait des doutes à l’époque… Il a fallu que je préside la Ciase pour que, 60 ans plus tard, je découvre que mes doutes étaient fondés. »

Cette intervention particulièrement documentée du président Sauvé était suivie d’une séance de travail sur « la réparation » que les victimes pouvaient attendre. Près de trois cents supérieurs d’instituts et congrégations ont alors échangé sur les différentes dimensions d’une « justice réparatrice », qui aille au-delà du « geste financier » qu’avaient proposé les évêques en novembre 2019.

Implorer un pardon
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Au cours des débats, il apparaissait que les religieux voulaient « mettre en lumière la singularité de chaque histoire blessée » et envisageaient des réponses personnalisées aux victimes. Deux d’entre elles, invitées aux échanges de cette matinée, insistaient sur le long travail à mener tant, disait l’une d’elles, « le crédit moral de l’Église a été pulvérisé. »

La journée avait débuté avec les paroles fortes de Sœur Véronique Margron, présidente de la Corref : « Voilà je crois le chemin que les uns et les autres avons à parcourir. Nous abaisser, quitter toute superbe, dire douloureusement notre honte, implorer un pardon, ne plus vouloir tout maîtriser et commander et changer en profondeur. Le compagnonnage avec des personnes victimes nous assigne à rapetisser un tant soit peu. Je crois que nous sommes décidés à le faire. »