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Casaniers, angoissés, hyperactifs: la génération Alpha, ces enfants qui auront 20 ans en 2030. Par Céline Cabourg, Le Figaro le 12.03.2023

Publié le 12/03/2023 à 06:00 , mis à jour le 12/03/2023 à 21:21Pour cette génération, tout reste à construire, et c'est pour cela qu'on l'a baptisé Alpha, première lettre de l'alphabet grec.Pour cette génération, tout reste à construire, et c'est pour cela qu'on l'a baptisé Alpha, première lettre de l'alphabet grec. Getty ImagesDÉCRYPTAGE - Succédant à la Génération Z, ces enfants nés en 2010 grandissent dans un monde en mutation, plein de contradictions… Et auront la lourde tâche de relever les défis de demain.

     Ils auront 20 ans en 2030. Dès 2025, ils représenteront environ 2,5 milliards d'une population mondiale qui en comptera 9. La planète n'aura jamais été si peuplée, les périodes de canicule seront plus fréquentes. Élevés dans un contexte de réchauffement climatique et d'épuisement des ressources, ils devront composer avec la fin de l'abondance, en trouvant des solutions pour y faire face. Pour eux, tout reste à construire, et c'est pour cela qu'on les a baptisés les alphas, première lettre de l'alphabet grec. Ce nom leur a été donné par l'Australien Mark McCrindle, chercheur en sciences sociales, qui a vu en cette classe d'âge née à partir de 2010, année de lancement de l'iPad et d'Instagram, ce qu'il appelle aussi la «génération de verre», en référence aux écrans auxquels ils sont exposés depuis leur plus jeune âge.

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Le nuage des mots de cette année-là dessine en pointillé l'environnement dans lequel ils évoluent : on y trouve pêle-mêle «selfie», «ubérisation», «émoji», «liker», «postvérité», «vapoter» ou encore «big data». Dans une accélération effrénée des évolutions, ces alphas succèdent à la génération Z, née entre 1996 et 2010. «Ils sont tout à fait identiques et radicalement différents», résume le psychiatre Alain Braconnier. «Ce qui a vraiment changé, c'est leur capacité à tout appréhender de manière concrète, en images, à travers les séries ou TikTok : la mort, la fortune, la sexualité. Cela crée une abrasion de l'imaginaire.» Qui sont vraiment les alphas ? Décryptage en quatre points clés.

Une chambre à soi

Ils auraient aussi pu s'appeler génération C, comme Covid et confinement, qu'ils ont connus alors qu'ils étaient très jeunes. Plus encore que leurs aînés, les alphas sont casaniers. Et même s'ils sont sur leurs téléphones, c'est souvent à côté des «darons-daronnes». «Autrefois, explique le psychiatre Stéphane Clerget, la fugue était le grand sujet d'inquiétude chez les ados. Aujourd'hui, ce n'est plus cas. Ils ont moins de frères et sœurs, sont choyés, même lorsque les parents sont séparés.» Et l'amour dans tout ça ? Ils y croient et s'engagent, mais pour eux, le couple est à durée déterminée, ajoute Stéphane Clerget : «Je n'ai pas vu un adolescent de cette génération croyant à l'amour pour la vie.» Ils sont ancrés dans un certain pragmatisme, qui oscille entre lucidité et pessimisme. Et certaines filles annoncent déjà ne pas vouloir d'enfants.

Des alphas angoissés

Cette génération Alpha, plus écoutée, n'est plus dans l'opposition aux parents. Ces derniers sont des millénnials, qualifiés de génération émotive du fait de leur capacité à verbaliser leurs émotions. Contrairement à ce qui se passait entre les générations précédentes, le lien parents-enfants ne découle plus de l'autorité de la loi, le «c'est comme ça et pas autrement». Beaucoup de parents se plaignent de l'absence de mode d'emploi et évoquent un certain désarroi. Le nécessaire échange entre parents et enfants se fait dans un cadre d'arbitrage de tous les instants. «Tout est en permanence une question de choix», résume Alain Braconnier, ce qui introduit un surcroît d'incertitude. «Le rôle de parent se réinvente en permanence. La rapidité du changement peut poser problème. Le corollaire de cette incertitude, ajoute-t-il, c'est l'angoisse qui ronge souvent ces alphas.» Une angoisse redoublée par le fait que le jugement des pairs a remplacé l'évidence du bien-fondé des actes, dictée par les aînés. Plus que jamais, ils doivent composer avec le regard des autres.

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Plus d'écrans, moins d'écrit

L'omniprésence des écrans complique la donne. Malgré les recommandations sanitaires – pas d'écrans avant l'âge de 2, voire 3 ans –, les parents eux-mêmes très connectés ne les respectent pas au quotidien. Selon l'étude Elfe de l'Ined et de l'Inserm datant d'octobre 2022 (qui étudie sur un temps long de vingt ans une population de 18.000 enfants nés en 2011), ils ne seraient que 13,5 % à s'y conformer. Un phénomène majoré en cas de séparation des parents et dans les milieux défavorisés. C'est la scène cauchemardesque que l'on a tous vue : eux, parents attablés dans un restaurant, le plus petit le nez collé à un dessin animé sur le téléphone, sa sœur à peine plus grande swipant frénétiquement sur une tablette.

On le sait désormais, cette addiction dès le plus jeune âge a des conséquences scientifiquement mesurées, avec des pathologies clairement identifiées : plus de cas de surpoids, de myopie, et tous les troubles liés à la sédentarité. Mais ce qui préoccupe le plus les médecins, c'est le déficit d'attention. Le psychiatre Stéphane Clerget a pu relever chez ces très jeunes une vraie baisse des performances : «Se concentrer sur un texte long devient pour eux difficile. S'asseoir et prendre le temps de lire un livre demande un vrai effort. Nombre d'entre eux sont diagnostiqués comme hyperactifs, et certains se voient prescrire des traitements. Habitués à passer d'une image à l'autre, ils sont dans une forme d'impatience qui va de pair avec de l'impulsivité.»

Une chose est sûre, la génération Alpha aura accès à une quantité de sources de connaissances. Les cours seront-ils dispensés en ligne ? Nul ne le sait encore mais, compte tenu de leur difficulté à se concentrer sur l'écrit, on peut supposer que la part de l'oralité dans l'enseignement ira croissante. Ce n'est peut-être pas un hasard si en France, dans le cadre de la réforme du baccalauréat, le grand oral a été rétabli. Dans le même temps, la nécessité du retour à la dictée se fait sentir. Le conférencier québécois Carol Allain, spécialiste des générations, insiste sur la nécessité pour l'école de se réformer, «en multipliant les disciplines créatives de manière à accompagner l'enfant dans un monde plus ouvert».

Le travail à réinventer

Auteur de plusieurs ouvrages sur les générations, le conférencier québécois multiplie aussi les interventions auprès des grandes entreprises à l'international : «On peut facilement dire que près de 85 % des métiers qu'exerceront les alphas n'existent pas encore. On peut se risquer à en imaginer : il y aura sûrement des psy-designers, des data-analystes, des fermiers urbains, des traders en CO2, et pourquoi pas des guides touristiques spatiaux ? avance-t-il avec cette touche d'humour qui le caractérise. On dit qu'ils auront 17 emplois, 5 carrières et 15 résidences», ajoute-t-il pour insister sur leur adaptabilité. N'en déplaise à ceux qui jettent les outils numériques avec l'eau du bain, cette génération, curieuse de tout, sera plus instruite. Et le spécialiste du monde du travail de leur trouver une devise : «Personne n'est trop petit pour changer les choses», là où les boomers devaient attendre d'avoir 25 ans pour se faire entendre. Ils veulent se ménager des espaces parallèles à côté de celui du travail, avoir du temps pour développer autre chose.

On peut facilement dire que près de 85 % des métiers qu'exerceront les alphas n'existent pas encore

CAROL ALLAIN, CONFÉRENCIER SPÉCIALISTE DES GÉNÉRATIONSLes influenceurs sont aussi passés par là : les alphas veulent être entrepreneurs… Et gagner beaucoup d'argent. L'écologie les concerne, mais ils sont fascinés par les success-stories des jeunes créateurs d'applis. Technophiles ? Ils se méfient des sciences et sont attirés par des croyances diverses. Ils veulent se connecter aux autres mais rester chez eux. Ce sera un des axes de leur vie : composer avec toutes ces contradictions. Le «faire avec», le pragmatisme, l'expérimentation remplaceront probablement les trajectoires linéaires par devoir.

Changement d'échelle

«Nos grands-parents vivaient à l'échelle de leur village, observe Stéphane Clerget. Notre génération voyait déjà à l'échelle du pays, mais eux se vivent comme habitants de l'univers. Ils ont développé une vision d'eux-mêmes dans un monde beaucoup plus vaste qui inclut des étendues parallèles comme le métavers. Ils ont une conception beaucoup plus globale du monde.» Une sérieuse incertitude demeure, liée au fait que leur socle de valeurs, lui, n'est plus comme pour les générations de leurs grands-parents fondé sur des projets collectifs, mais davantage sur des valeurs individuelles. L'écologie les aidera-t-elle à réinventer du collectif ?En vidéo : «Quels sont les impacts des écrans sur le cerveau des enfants ?»